RU 27/2013 - La Sainte Trinité de Rublev


 

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Gauche : Trinité gothique (Bibl. Nationale de Paris) – Centre : La Sainte Trinité de Roublev – Droite : La Sainte Trinité dans l’église d’Urschalling/Bavière

LA PLUS GRANDE BONNE NOUVELLE (ru, 8 juillet 2013)Le mystère central du christianisme révélé par N.S. Jésus-Christ – la Sainte Trinité – est par essence ineffable, mais des grands Chrétiens ont essayé d’en dessiner une représentation, pour annoncer cette Bonne Nouvelle sous une forme accessible aux hommes. Contemplons celle du peintre-moine orthodoxe Andrei Roublev dont la célèbre icône est l’aboutissement parfait d’un développement iconographique de ce thème pendant plus de 1000 ans . Roublev a été canonisé par l’Eglise orthodoxe en 1988, et son icône élevée au modèle des saintes icônes par le concile orthodoxe de 1551. Cette icône, peinte vers 1411, se trouve aujourd’hui dans la Galerie Tretyakov à Moscou, mais avait initialement sa place dans le monastère Sainte Trinité de St Serge, près de Moscou.

Au-delà de la dignité vénérable de cette image, rayonnant une lumière, une paix et un calme extraordinaires, certains détails se révèlent au spectateur attentif :

- Trois anges sont assis autour d’une table, allusion aux trois hôtes célestes qu’Abraham avait accueillis chez lui (Gen 18, 1-16).

- Leur coexistence paisible et aimante autour d’un repas apparaît comme une bonne nouvelle à une humanité éclatée en innombrables langues et cultures, continuellement en proie à des guerres et refus de partage.

- L’identité de la taille, dignité et sainteté (nimbes) des trois anges semble vouloir exprimer l’unique être divin – un seul Dieu en trois personnes.

- L’inclinaison des têtes exprime d’intenses relations entre les trois.

- La table des convives se présente plutôt comme un autel autour duquel Dieu et ses anges concélèbrent la liturgie céleste et à laquelle l’homme racheté (le spectateur) est invité par la place devant.

- Toutes les anciennes églises sont orientées vers l’est, lieu traditionnel du jardin d’Eden, du paradis et du ciel, démontrant par ce fait la liaison intime entre la liturgie céleste et la sainte messe de l’Eglise, lien sacramentel entre la promesse du salut et le salut, entre terre et ciel.

- Comme toutes les icônes de grande taille, elle était destinée aux fêtes de l’Eglise, en particulier à la fête de Pentecôte (puisque l’Eglise orthodoxe n’a pas de fête de la Sainte Trinité), l’effusion de l’Esprit Saint étant considéré comme l’accomplissement de la révélation de la Sainte Trinité.

- Cette icône avait sa place à droite du portail du Christ dans l’iconostase, signifiant qu’ici, dans l’apside orientale de l’église, commence le ciel vers lequel toute l’Eglise, avec tous les croyants, est tournée.

- La figure centrale représente apparemment le Christ, celle des trois personnes divines qui s’est révélé le plus par le fait de son Incarnation. Il regarde le Père en inclinant tendrement la tête, et le Père regarde le Saint Esprit (figure à droite) qui s’incline également humblement vers le Père.

- Plus particulièrement la main droite du Christ indique (initialement d’un seul doigt) le calice au centre de la table que le Père, de sa main droite, bénit, tout en regardant le Saint Esprit qui, Lui, baisse sa main droite renforçant ainsi l’inclinaison de la tête vers le Père.

- Le génie de Roublev a su intégrer en une seule image trois traditions iconographiques millénaires : biblique (l’hospitalité d’Abraham), christique (la Cène) et trinitaire (union hypostatique). Ceci s’exprime dans les gestes des mains (biblique : partage d’un repas ; christique : Ceci est mon corps et mon sang ; trinitaire : don total mutuel des personnes divines), dans le mobilier (biblique : table et victuailles; christique : l’autel avec l’Agneau expiatoire dans le calice ; trinitaire : la liturgie céleste), dans la nature à l’arrière plan (biblique : paysage naturel ; christique : l’Eglise, l’arbre de vie et de la croix, et le rocher salutaire ; trinitaire : l’univers au service de Dieu), dans les bâtons portés (biblique : les bourdons de marche ; christique : sceptres de royauté ; trinitaire : palmes de gloire éternelle); et de même pour les vêtements, les couleurs et tous les autres détails de l’icône.

- Ainsi, quoique similaires en touts points, les trois personnages se distinguent parfaitement dans leur personnalité.

- Le petit cube situé sur le front de la table l’identifie clairement comme autel, car les Orthodoxes utilisent cet endroit localisé toujours à l’est ( !) pour y conserver les reliques et parfois mêmes les saintes espèces.

- De l’icône émane une lumière mystérieuse intense, matérialisée par l’or partout présent, celle venant de la Vérité révélée, et en tout premier lieu de la Sainte Trinité, annoncée dès l’Ancien Testament par la figure des 3 hommes hôtes d’Abraham, ensuite par les 3 anges célébrant les Saints Mystères, et enfin par les 3 personnes divines vivant en parfaite union.

     Cette icône est un rayon de grâce appelé à nous remplir et sanctifier.


-  O.A.M.D.G.  -