Journal de bord (suite 22)


Mardi 27 mai 2008

Un enseignant nous téléphone. Une de ses élèves, Léa, se serait ouverte à lui en lui disant ceci. Elle a 20 ans, famille musulmane, enceinte. Elle aimerait bien garder le bébé, mais sa mère veut absolument qu’elle avorte. Son copain était d’abord « pour » le bébé, maintenant sous l’influence de la mère « contre ». Le père de Léa se tient pratiquement neutre, même s’il n’est pas totalement contre ce bébé, mais l’influence de la mère est écrasante. Cette dernière se vante d’avoir déjà avorté 5 fois… Léa se sent très liée à elle. Elle a avalé hier une première pilule RU 486, mais l’aurait revomie peu après. Est-ce qu’elle la prendra à nouveau aujourd’hui ? – Nous avons proposé à cet enseignant de recontacter Léa, de lui parler de nous, et qu’elle vienne nous voir jeudi matin 11 heures. Que Dieu nous l’envoie, et ce sera gagné. Mais il faudra la séparer de sa mère. – PS : Léa n’est jamais venue… Souvent ce genre de contacts téléphoniques, et encore par des tiers, n’aboutissent pas. C’est pourquoi nous préférons le contact direct : là nous n’avions jamais eu d’échec, grâce à Dieu.

Jeudi 12 juin 2008

Solange, secrétaire à Paris, veut avorter. Elle a 22 ans, est « riche », et a déjà avorté une fois auparavant. Puisque nous n’avons pas le contact direct, nous donnons un certain nombre de conseils à un ami de travail qui nous a téléphoné à son sujet. Il paraît que tout est en vain. Solange est d’un milieu bourgeois, pour nous tabou. Nos méthodes ne sont pas adaptées à ce milieu-là. Nous nous posons même la question si l’Evangile est adapté à ces gens-là. Jésus n’a-t-il pas donné la priorité aux « pauvres, ceux qui pleurent, ont faim, soif, sont nus, sont persécutés », et non pas aux riches, auto-suffisants, bien vêtus, bien gras… C’est Son choix, un choix divin. Nous le subissons volontiers. Ne reste qu’à prier. « Certains (diables) ne sortent qu’avec du jeûne et des prières », dit encore Jésus.

A une amie qui se dit « scandalisée » de notre petite notice sur Solange « la bourgeoise » que nous lui avons fait parvenir, puisqu’elle avait entendu de loin de cette affaire, nous avons répondu ceci : Vous n’êtes pas la seule à être « choquée ». Pourtant c’est vrai, ce mot incroyable de Jésus :« Heureux les pauvres… ! Heureux ceux qui pleurent… ! » Et cet autre mot : « C’est plus facile pour un chameau de passer par le chas d’une aiguille que pour un riche de parvenir au Royaume des Cieux » (cité de mémoire). Pire : il faut que nous-mêmes devenions des « pauvres », des enfants, des malades qui frappent à la porte de Dieu, « sinon vous n’entrerez pas ». Croyez-vous que cette secrétaire fûtée Solange soit une de ces pauvres ? Croyez-vous que … nous-mêmes soyons des pauvres  du Royaume ? Dans ce sens, nos petits bébés et leurs pauvres mères – qui pleurent, ont besoin de logement, d’amour, d’aide, de layettes… - , ce ne sont pas nous qui les sauvons, en essayant de les aider un peu - ce sont elles qui nous sauvent. Cela ne vient pas de moi, mais de l’Evangile, plus précisément du Père Talvas, déjà décédé. Ce Père avait fondé « Le Nid » pour sortir les prostituées de leur malheur. C’est en collaborant au Nid que l’on peut apprendre comment chercher son salut chez les pauvres – pas chez les riches (« bourgeois » dirait-on aujourd’hui) -, comment se mettre à leur écoute, à leur école, à leur service. Merci les pauvres, merci mille fois ! Et merci, Seigneur, pour tous ces pauvres, - « Heureux les pauvres ! » - sans eux il n’y aurait point de Royaume des Cieux pour nous-mêmes ! Ah décidemment, Dieu est déconcertant, fantastique, passionnant, merveilleux, toujours de nouveau à découvrir ! Le Ciel, ça doit être cela, et ça commence déjà un peu sur terre.

Mardi 17 juin 2008

Côte d’Azur: un ami de SOS MAMANS, voit de loin comme quelqu’un saute (ou tombe ?) d’une embarcadère de voiliers dans la mer. Il court vite, voit une jeune fille s’agiter dans l’eau, enlève sa veste, saute dans l’eau et la sort de là. Elle avait déjà bu beaucoup d’eau de mer et perdu conscience : bouche-à-bouche,  pressions sur la poitrine, elle reprend vie. Il s’agit de Nadine, 17 ans, enceinte, chassée par sa famille, tentative de suicide par noyade après avoir avalé beaucoup de « médicaments ». Nous arrangeons vite, chez une famille hébergeuse sur la côte d’Azur, une place pour Nadine. Elle est sauvée, et le bébé aussi. Deo gratias !

Vendredi 20 juin 2008

Une jeune fille de 22 ans, originaire des DOM-TOM, étudiante en droit, rejoint notre groupe opérationnel de Paris : « J’ai vu votre travail, c’est du concret, cela m’a convaincue. Je veux travailler avec vous. C’est ce genre d’engagement qui nous manque à la paroisse… » Nous l’avions invitée ainsi à une de nos sessions de travail comme nous les pratiquons 2 à 3 fois par semaine, ce matin dans un café quelconque parisien (les cafés, ce sont nos bureaux !). Le but ? Après avoir participé un peu à notre équipe, elle pourrait fonder elle-même un nouveau groupe SOS MAMANS autour d’elle, là où elle habite (Paris 20e et 2e), autonome. Nous ne sommes pas des Communistes : rien n’est centralisé chez nous. Tous les groupes sont autonomes – et doivent se financer par leur propre réseau de donateurs, un réseau chaque fois à bâtir et élargir pendant des années.. Pour ce genre de sauvetages, il n’y a pas besoin de beaucoup d’organisation et de paperasse, mais d’énormément de bonne volonté, de patience et d’amour. On est déconcerté tous les jours, pas moyen de systématiser le travail, pas moyen de s’installer confortablement dans une organisation bien rôdée. Chaque situation est neuve, chaque rencontre bouleverse, chaque solution de problème est à inventer sur place, chaque fois c’est la recherche des moyens (financiers) nécessaires pour aider dans la situation concrète, et ceux-ci arrivent ensuite comme par miracle. Est-ce le Royaume de Dieu ? Lui seul le sait. En tout cas, grâce à Dieu nous sommes à « notre » 442e bébé sauvé – et autant de mamans.